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Les projets d’impression 3D dans le secteur du nucléaire

Publié le 2 mars 2023 par Tom Comminge
impression 3D nucléaire

L’un des secteurs où la fabrication additive a eu un rôle croissant ces dernières années est l’énergie. Déjà, nous vous avons parlé des nombreuses applications de l’impression 3D dans le domaine du pétrole et du gaz, mais saviez-vous qu’elle est également utilisée pour des applications nucléaires ? L’industrie des centrales nucléaires a gagné en importance ces dernières années, les données de l’Association nucléaire mondiale montrant qu’en 2019, elle était la deuxième plus grande source d’énergie à faible teneur en carbone au monde, avec 438 réacteurs exploitables répartis dans 33 pays. De plus, en 2020, la production mondiale totale d’électricité nucléaire était de 2 591 milliards de kWh, soit 10,1 % de la production électrique mondiale totale, selon l’Administration américaine d’information sur l’énergie (EIA). Compte tenu de cette montée en puissance, il est tout aussi logique que le secteur se tourne également vers les nouvelles technologies, notamment la fabrication additive. Pour mieux comprendre comment elle est utilisée, nous avons examiné de plus près certaines des principales utilisations de l’impression 3D dans les centrales nucléaires, sans ordre particulier.

Un réacteur imprimé en 3D par l’ORNL

L’un des acteurs les plus actifs dans le domaine du nucléaire et de l’impression 3D est sans doute le Oak Ridge National Laboratory (ORNL) aux Etats-Unis. Ses équipes travaillent depuis plusieurs années sur la façon dont la fabrication additive peut influencer la façon dont on pense le nucléaire. En mai 2020, ils avaient par exemple présenté le un premier prototype d’un cœur de réacteur, imprimé en 3D métal via une machine DED. Ce projet s’inscrit dans le programme “Transformational Challenge Reactor Demonstration” (TCR), dont l’objectif est d’imaginer des systèmes énergétiques moins chers et plus productifs, le tout dans des délais très courts. D’ailleurs, ce cœur de réacteur a pu être créé en trois mois seulement, de la phase de design au post- traitement ; le processus d’impression a quant à lui nécessité 40 heures de travail, sur des température atteignant les 1 400°C. Vous pouvez d’ailleurs visionner l’impression 3D accélérée dans la vidéo ci-dessous :

Ultra Safe Nuclear Corporation en collaboration avec Oak Ridge National Laboratory

Ultra Safe Nuclear Corporation est une entreprise nucléaire américaine qui vise à développer et à intégrer des solutions nucléaires sûres, propres et commercialement compétitives. En 2022, elle a annoncé son intention de collaborer avec le Oak Ridge National Laboratory (ORNL) afin d’utiliser les capacités de fabrication additive de ce dernier pour faire progresser l’énergie nucléaire, en utilisant le procédé de liage de poudre pour fabriquer des micro-réacteurs modulaires. Le choix de l’impression 3D permet à l’équipe de surmonter les difficultés liées au travail du carbure de silicium, un céramique technique. Ultra Safe Nuclear fera ainsi des économies et pourra concevoir des géométries plus complexes qu’avec les méthodes conventionnelles.

impression 3D nucléaire

Crédits photo Ultra Safe Nuclear Corporation

ČEZ optimise sa chaîne d’approvisionnement grâce à l’impression 3D

ČEZ est une entreprise de services publics et la plus grande société publique d’Europe centrale et orientale. Leur département nucléaire, qui collabore avec la société tchèque d’énergie nucléaire Škoda JS, s’est tourné vers la fabrication additive pour optimiser sa propre chaîne d’approvisionnement et réduire les temps d’arrêt. Rien que cette année, ils ont fabriqué 4159 pièces en plastique et en métal grâce à cette technologie. Une imprimante 3D à grande échelle permet de produire des pièces métalliques pesant jusqu’à 600 kg, ce qui permet de remplacer les pièces défectueuses en peu de temps. Bohdan Zronek, membre du conseil d’administration de ČEZ et directeur de la division énergie nucléaire, a expliqué que les pièces géométriquement plus simples sont produites par des méthodes traditionnelles, tandis que l’impression 3D est particulièrement adaptée aux pièces complexes, notamment pour les engrenages.

impression 3D nucléaire

L’impression 3D métal est la méthode la plus utilisée par les entreprises du nucléaire (crédits photo : Markforged)

Composants critiques pour la sécurité dans un réacteur d’Alabama

Aux États-Unis, 93 centrales nucléaires sont actuellement en service, selon les données de L’Agence d’information sur l’énergie. L’une d’entre elles est la centrale nucléaire de Browns Ferry de la Tennessee Valley Authority située à Athens, en Alabama, la deuxième centrale nucléaire la plus puissante du pays. Ce qui est particulièrement intéressant pour nous, c’est que c’est là, dans l’unité 2 de la centrale plus précisément, que la TVA, Framatome et le programme Transformational Challenge Reactor, ou TCR, financé par le DOE Office of Nuclear Energy et basé au Oak Ridge National Laboratory (ORNL) ont installé quatre supports d’assemblage de combustible imprimés en 3D pour une utilisation dans un réacteur nucléaire en 2021. Le projet était le premier du genre dans le pays et montrait qu’il était possible de déployer des composants imprimés en 3D qualifiés dans des environnements hautement réglementés, comme les réacteurs nucléaires. Les fixations de sécurité, qui sont des composants critiques pour la sécurité, ont été fabriquées à l’aide de la fusion laser sur lit de poudre et du TruForm 316 (Fe-271), un alliage de poudre métallique composé de fer, de nickel, de chrome et de molybdène. L’impression 3D a été choisie comme moyen d’aider à réaliser la géométrie non symétrique des fixations.

La première pièce imprimée en 3D en service dans une centrale nucléaire

La première pièce imprimée en 3D en service dans une centrale nucléaire a été fabriquée par Siemens. Il s’agit d’une roue métallique de 108 mm de diamètre en fonctionnement constant à la centrale nucléaire de Krško, en Slovénie, conçue et fabriquée de manière additive par Siemens. Le recours à l’impression 3D était essentiel, car la roue d’origine était en service depuis la mise en service de la centrale en 1981 et son fabricant d’origine n’est plus en activité. L’équipe de Siemens en Slovénie a donc procédé à une rétro-conception et créé un « jumeau numérique » de la pièce afin d’utiliser l’impression 3D métallique pour recréer la pièce. Le projet a marqué une étape importante pour le secteur, car pour la première fois, une pièce imprimée en 3D a démontré un fonctionnement sûr et a passé tous les tests requis pour l’énergie nucléaire, l’une des industries les plus complexes et les plus exigeantes.

impression 3D nucléaire

Crédits photo : Siemens

Le projet de l’Université du Dakota du Nord

Un groupe de chercheurs de l’université du Dakota du Nord a créé un projet visant à développer des réacteurs nucléaires imprimés en 3D à l’aide d’acier renforcé. Roy Sougata (professeur d’ingénierie mécanique) et son équipe utiliseront de l’acier austénitique pour concevoir ces composants. Cet alliage métallique est renforcé par de l’azote et sera la principale matière première du processus de fabrication. Pour l’instant, aucune information n’a été fournie sur l’imprimante 3D utilisée et l’idée principale est de voir si ces composants imprimés en 3D sont plus efficaces que ceux conçus de manière traditionnelle. La conception des pièces sera réalisée à l’université du Dakota du Nord, tandis que des analyses plus poussées seront effectuées au Oak Ridge National Laboratory (ORNL). De plus, les tests des composants porteront sur leurs propriétés tribologiques, la science de l’usure, de la friction et de la lubrification, à haute température.

impression 3D nucléaire

L’acier austénitique est utilisé comme matériau principal (crédits photo : Dr. K. Natesan).

Westinghouse exploite l’impression 3D pour ses réacteurs nucléaires

L’impression 3D joue un rôle important dans la fabrication de pièces fonctionnelles. En 2020, Westinghouse Electric Company a installé un dispositif d’obturation fabriqué en 3D dans l’un de ses réacteurs nucléaires. À l’époque, il s’agissait d’une première dans l’industrie. L’entreprise a continué à mettre l’accent sur la fabrication additive et, deux ans plus tard, a de nouveau innové en installant un filtre à débris imprimé en 3D, le StrongHold AM, dans deux réacteurs à eau bouillante (REB), respectivement en Finlande et en Suède. Ces filtres offrent des caractéristiques de capture améliorées et représentent un pas en avant pour l’entreprise dans l’adoption de la fabrication additive.

impression 3D nucléaire

Crédits photo : Westinghouse

Framatome et son composant d’assemblage de combustible imprimé en 3D

La multinationale française Framatome a annoncé avoir développer un composant d’assemblage de combustible imprimé en 3D en acier inoxydable. Ce produit a été fabriqué dans une centrale nucléaire de Forsmark en Suède, plus particulièrement dans l’entreprise de Vattenfall. Il s’agit d’une première pour la société française qui a procédé à l’installation du composant avec succès. La pièce est une grille d’extrémité supérieure visant à maintenir les crayons de combustible, des tubes métalliques où sont empilées des pastilles cylindriques de dioxyde d’uranium fritté. Elle a aussi été fabriquée pour empêcher les débris volumineux d’aller dans l’assemblage combustible. Pour la produire, une technologie d’impression 3D laser a été utilisée, mais Framatome n’a pas mentionnée laquelle précisément.

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Crédits photo : Framatome

Micro-réacteur imprimé en 3D

L’université Purdue, dans l’Indiana (États-Unis), a reçu une subvention de 800 000 $ du ministère américain de l’énergie pour participer à la création d’un microréacteur imprimé en 3D. L’université participera au programme de démonstration du Transformational Challenge Reactor, dans le cadre où le Oak Ridge National Laboratory du ministère de l’énergie travaille à la création du premier micro-réacteur imprimé en 3D d’ici 2023. L’équipe de Purdue aura pour mission de mettre au point une technologie d’intelligence artificielle permettant de garantir la qualité des composants de réacteurs nucléaires fabriqués de manière additive. La combinaison de la fabrication additive et des techniques d’intelligence artificielle permet un processus de qualification des composants nucléaires plus riche en données et plus rentable. Dans le détail, la solution de l’université Purdue appliquera l’apprentissage par renforcement, un type d’intelligence artificielle qui utilise des stratégies avancées d’apprentissage automatique pour affiner la sélection des paramètres optimaux du processus de fabrication additive, tels que la vitesse d’impression et la température de fusion, afin d’entraîner les modèles d’IA et de guider le processus de prise de décision, le rendant plus efficace et plus rapide.

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Composants imprimés en 3D du réacteur nucléaire. (crédit photo : ORNL)

BWX Technologies et l’ORNL pour la fabrication de composants nucléaires

BWX Technologies et le laboratoire national américain d’Oak Ridge (ORNL) ont travaillé sur une technologie d’impression 3D métallique pour la fabrication de composants nucléaires. Dans le but d’alimenter un réacteur nucléaire, les deux partenaires ont pour objectif de produire des pièces à partir d’alliages à haute température à base de nickel et de métaux réfractaires. BWX Technologies aurait utilisé un système de fusion par faisceau d’électrons pour imprimer en 3D les pièces. D’après l’entreprise, le choix de ces matériaux a permis aux chercheurs d’augmenter la résistance des composants aux températures allant jusqu’à 1 482°C, et d’atteindre des rendements globaux de l’usine d’environ 50 %. La fabrication additive permet aussi de diminuer les coûts, notamment au niveau de l’entretien des pièces et de leur réparation, mais aussi d’accélérer l’étape de prototypage des composants.

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Crédits photo : ORNL

Que pensez-vous de ces projets d’impression 3D conçus pour le secteur du nucléaire ? Partagez votre avis dans les commentaires de l’article. Retrouvez toutes nos vidéos sur notre chaîne YouTube ou suivez-nous sur Facebook ou Twitter !

*Crédits photo couverture : Nicolas HIPPERT sur Unsplash

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