La pénurie de plastique va-t-elle paralyser le secteur de la fabrication additive ?
Depuis le début de la crise sanitaire, le monde entier fait face à une pénurie de nombreux matériaux. À l’instar du secteur du BTP paralysé par le manque de bois, le monde de la fabrication additive est lui aussi confronté à une importante pénurie : celle du plastique. Et ce manque de plastique n’est pas sans conséquence. La majorité des fournisseurs de filaments, comme les pétrochimistes, sont lourdement impactés tandis que de nombreux plasturgistes accusent d’importantes pertes économiques et ont été contraints de réorganiser voire stopper leur production. Face à cette crise de matériaux, les acteurs de la fabrication additive, rencontrant d’énormes difficultés pour être réapprovisionner, ont été obligés de puiser dans leur stock, mais au fil du temps, les réserves de plastique s’épuisent.
La pandémie a bien évidemment mis en lumière des tensions de marché : arrêts de production non planifiés, difficultés d’approvisionnement, délais rallongés, augmentation de certains besoins, etc. Ces facteurs impactent l’ensemble des chaînes de valeur et mettent en évidence les limites de nos systèmes logistiques actuelles. Si on s’intéresse à l’industrie du plastique plus précisément, il semblerait que les grades techniques comme l’ABS, le polycarbonate et certains polyamides soient les plus demandés, ayant alors une répercussion directe sur le secteur de la fabrication additive. Florent Port, Président chez Francofil, fabricant français de filaments d’impression 3D, explique : « La baisse des activités de transports (du transport aérien et réduction drastique du trafic automobile en raison des confinements) a entrainé la diminution des besoins en produits raffinés. Les raffineurs, qui se sont retrouvés avec des cuves pleines, ont donc ralenti la production. Et comme ce sont les dérivés de ce raffinage qui permettent de faire les monomères et ensuite les polymères dont nous avons besoin pour les filaments, les prix explosent. »
Polyvia, une organisation professionnelle représentative des transformateurs de polymères sur l’ensemble du territoire français, ajoute quant à lui que l’un des secteurs les plus touchés est celui de l’automobile. Également en proie aux pénuries de semi-conducteurs et plus globalement de pièces électroniques, l’industrie automobile connaît pour le moment une période difficile. Pour ce qui est du domaine médical, il est pour le moment relativement épargner, les fournisseurs ayant conscience qu’il s’agit d’un secteur primordial. Cependant, dans certains hôpitaux, comme l’AP-HP, le manque de plastique commence à se faire ressentir – le plastique étant utilisé pour l’analyse des tests de détection du Covid-19.
Une flambée des prix
Logiquement, face à cette pénurie, les prix des différents plastiques ont drastiquement augmenté. Par exemple, pour le polyéthylène et le polypropylène, les prix ont doublé entre janvier et mai 2021. La tonne de PVC a quant à elle augmenté son prix de 115% entre juillet 2020 et février 2021, soit plus de 1 800 dollars ! Polyvia nous a confié : “Les pétrochimistes sont impactés par les arrêts déclarés et les quantités qu’ils produisent ont diminué. Ces mises sous allocations sont généralement assorties de hausses de prix. Dans la même veine, les « transformateurs » qui fournissent des filaments ont probablement plus de difficultés à acheter des polymères en quantités suffisantes et à des prix raisonnables, et pourraient reporter ces hausses sur leurs clients.” Une hausse des prix qui pourrait impacter le marché de la fabrication additive d’ici peu, secteur dans lequel le plastique est le matériau le plus utilisé.
Comme expliqué précédemment, même si les prix ont augmenté et que les acteurs de la fabrication additive puisent dans leur stock, le marché de l’impression 3D n’est pour le moment pas entièrement paralysé. Mais d’ici quelques temps, ils seront probablement poussés à trouver une alternative au plastique. Et les solutions qui s’offrent à eux sont limitées. Interrogé par 3Dnatives à ce sujet, Kimya, le fournisseur de matériaux 3D du groupe Armor, explique que le marché de l’impression 3D risque d’être obligés d’utiliser des matériaux dits alternatifs. Parmi ces matériaux, on retrouve par exemple ceux conçus à partir de déchets ou de matériaux déjà utilisés. Mais si les impressions d’objets à partir de matériaux recyclés se multiplient, à l’image des jardinières fabriquées par Aectual, elles sont pour le moment une minorité. De plus, Kimya précise que les matières conçus à partir de matériaux recyclés sont plus onéreux que les matériaux « classiques », notamment de par leur faible quantité.
Vers un retour à la normale ?
Pour le moment, personne ne sait combien de temps les différentes pénuries actuelles vont durer. Selon, Florent Port, Président chez Francofil, il est légitime d’espérer un retour à la normale d’ici peu avec la reprise globale de l’activité économique. D’autant plus que, toujours d’après Francofil, la pénurie de plastique a en partie été provoquée par la baisse des activités de transports. Avec la reprise de celles-ci, l’industrie du plastique devrait alors elle aussi reprendre son cours.
Vous l’aurez compris, à l’heure actuelle, il est difficile de se prononcer sur l’avenir de la pénurie de plastique. Une chose est sûre, tant que les activités économiques du monde entier seront limitées, les acteurs de la fabrication additive devront faire face à des manques de matériaux, et seront contraints de ralentir leurs activités.
Quel regard portez-vous sur cette pénurie de matériaux ? N’hésitez pas à partager votre avis dans les commentaires de l’article ou avec les membres du forum 3Dnatives. Retrouvez toutes nos vidéos sur notre chaîne YouTube ou suivez-nous sur Facebook ou Twitter !