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Quel est le potentiel des NFT pour le secteur de la fabrication additive ?

Publié le 28 octobre 2021 par Mélanie W.
NFT

NFT, blockchain, Ethereum, Ether, crypto-monnaie, eWallet, Metaverse… Vous avez probablement rencontré ces termes souvent ces derniers mois. Ils se retrouvent en effet dans nos médias et alimentent le débat pour savoir si le commerce des actifs numériques n’est qu’une nouvelle bulle d’investissement ou si le battage médiatique peut nous conduire vers une nouvelle ère. Pour les artistes et les investisseurs en particulier, cette question est importante. Mais que signifient ces mots à la mode ? Qu’est-ce qu’un NFT (non-fungible token ou jeton non fongible en français) et pourquoi est-il si populaire ? Mais plus particulièrement, en quoi un tel marché numérique peut-il être intéressant pour la fabrication additive ? Nous nous sommes entretenus avec Danit Peleg, styliste réputée pour ses vêtements imprimés en 3D, et Ioan Florea, créateur de la première collection d’art imprimé en 3D, pour savoir ce que les artistes espèrent tirer des crypto-monnaies, en particulier ceux de la communauté de l’impression 3D. L’expert en blockchain Jérôme de Tychey, Global Head of Client Success chez Ledger et président d’Ethereum France, nous a donné un aperçu des défis juridiques entourant les NFT.

Que sont les NFT ?

On pourrait penser que les NFT sont un phénomène encore assez récent, mais ils sont en réalité apparus en 2014-2015. Acronyme de non-fongible token, les NFT ne sont pas interchangeables. Pour que ce caractère unique des jetons ait un sens, il est important de comprendre qu’un jeton non fongible a une certaine valeur, similaire à d’autres formes de monnaie bien connues comme l’euro ou le bitcoin. Cependant, contrairement au bitcoin, un NFT n’est pas interchangeable avec un autre NFT, ils ont un code d’identification individuel et ne peuvent pas être échangés entre eux (comme ce serait le cas avec le bitcoin ou l’euro). De ce fait, il est possible d’extraire des biens numériques de toute nature (tels que des illustrations, des clips vidéo, des messages sur les médias sociaux) et de leur attribuer une certaine valeur.

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La différence entre des actifs fongibles et non-fongibles

Jetons un coup d’œil à certaines des œuvres qui ont déjà été vendues avec succès en tant que NFT. L’œuvre la plus chère est un fichier JPEG portant le nom de « Everyday : The First 5000 Days » qui a été vendu aux enchères par Christie’s au début de l’année pour la somme de 69 millions de dollars. Il s’agit d’un collage de 5 000 œuvres individuelles de l’artiste Beeple (Michael Joseph Winkelmann), faisant de l’Américain l’un des trois artistes vivants ayant le plus de valeur.

Un autre exemple bien connu est le premier message Twitter de Jack Dorsey, cofondateur de Twitter, qui s’est vendu à 3 millions de dollars américains.

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Le collage « Everyday: The First 5000 Days » a été vendu à 69 millions de dollars

Les NFT et l’impression 3D

Dans le secteur de la fabrication additive, il est de plus en plus courant de trouver des artistes qui proposent leurs œuvres à la vente sur des places de marché numériques comme Rarible ou OpenSea en tant que NFT. Danit Peleg est l’une d’entre eux. Non seulement elle est l’une des pionnières en matière de mode imprimée en 3D, mais elle sait aussi comment créer de la valeur pour ses designs en utilisant des jetons non fongibles. La jeune styliste nous a confié qu’elle réfléchissait depuis plusieurs années à la manière de documenter de manière sécurisée le processus numérique de ses œuvres et de le mettre à la disposition des autres. Elle explique le processus comme suit : lorsqu’une personne intéressée lui achète un jeton non fongible, elle a accès à un dossier attribué au numéro NFT. Ce dossier contient un certain nombre de fichiers, notamment des instructions sur les paramètres d’impression et un guide sur la manière d’assembler les différentes pièces pour obtenir le vêtement fini.

Les designs de Danit Peleg peuvent être acheté sur Rarible en édition limitée

Parce qu’elle fournit les fichiers au moment de l’achat, Danit Peleg crée un pont entre le bien numérique et un objet physique que les acheteurs peuvent imprimer en 3D eux-mêmes ou lui commander. Elle ajoute : « Je permets à mes acheteurs de fabriquer eux-mêmes leurs vêtements de manière additive. Je ne les limite en aucun cas, bien au contraire, je trouve cela extrêmement intéressant de suivre ce qu’ils font de mes créations plus tard. » Par exemple, ils ont la possibilité de choisir eux-mêmes le matériau et la couleur de leur vêtement, ce qui permet de créer un objet physique unique. S’il n’en tenait qu’à Danit Peleg, des collections entières pourraient être vendues sous forme de NFT à l’avenir. Le bien numérique acheté pourrait alors se transformer en fonction de la saison : un T-shirt pourrait devenir un pull pour la saison d’hiver. Dans tous les cas, elle apprécie la multitude de nouvelles opportunités commerciales que les NFT créent pour les artistes.

Ioan Florea, dont l’art est basé sur la philosophie et les possibilités des technologies open source, propose également à la vente des objets d’art imprimés en 3D en tant que NFT. Il explique : « Les NFT vous donnent accès à la propriété et à l’utilisation de l’œuvre d’art du fichier imprimé en 3D. Je pense que c’est la première étape pour que l’art imprimé en 3D devienne une nouvelle forme d’art. À ce stade, l’art imprimé en 3D n’est pas reconnu comme une œuvre d’art aux yeux de la fiscalité ou des douanes par exemple. Il est considéré comme un prototype industriel fabriqué par une machine. »

Le G-Code de Ioan Florea peut être acheté pour 0.3 Ether (au 13/10/2021, cela correspond à 899.40 Euro)

Il explique également que les acheteurs de ses NFT font partie d’une génération qui investit dans les crypto-monnaies et qui est convaincue de leur valeur et de leur pérennité. Comme Danit Peleg, les acheteurs de Ioan Florea reçoivent le fichier 3D avec le contenu déverrouillé, dans certains cas également un lien vers le fichier STL original. Ioan Florea souligne ici l’avantage de l’impression 3D associée aux NFT, car ils sont souvent liés à un objet physique ; les acheteurs ont la possibilité de générer un objet physique pour eux-mêmes, ce qui n’est pas le cas avec d’autres biens numériques. Cela fait de l’impression 3D un candidat idéal pour les NFT, car même si le prix de la crypto-monnaie fluctue, les acheteurs auront toujours un objet d’art physique à toucher.

Où le jeton se situe-t-il et quelle est la règlementation appliquée ?

Comme les autres crypto-monnaies, les NFT reposent sur une blockchain, c’est-à-dire une base de données décentralisée, qui permet de stocker l' »empreinte numérique » de l’œuvre et de rendre son caractère unique et sa propriété identifiable. Parmi les blockchains les plus populaires figure Ethereum. Jérôme de Tychey  explique : « Ethereum offre la souplesse nécessaire pour répertorier, mettre aux enchères et automatiser les NFT. Les contrats intelligents (essentiellement des logiciels utilisés au sein de la blockchain) viennent jouer un rôle important dans Ethereum, alors qu’ils sont utilisés de manière limitée dans Bitcoin. » Ces contrats intelligents peuvent stipuler, par exemple, que le créateur de l’œuvre recevra un certain pourcentage de la valeur de vente chaque fois qu’elle sera revendue. Les artistes ont ainsi l’avantage de profiter d’une augmentation de la valeur de leurs œuvres.

Les NFT sont des biens virtuels, situés sur une blockchain, et sont destinés à attribuer la propriété d’une œuvre d’art aux acheteurs. Cela soulève bien sûr de nombreuses questions juridiques, notamment sur le droit d’auteur, la loi sur la protection des données et les aspects financiers. Jérôme de Tychey nous a expliqué lors d’une conversation que nous sommes actuellement encore dans une zone grise complète en matière de propriété intellectuelle. Selon lui, divers experts dans ce domaine s’accordent à dire qu’il n’y a pas de droits associés au fichier auquel le jeton est lié, et qu’aucune réglementation ne peut actuellement être appliquée. Les droits associés aux NFT ne pourraient être réellement appliqués que dans le contexte de la blockchain dans laquelle ils sont émis et existent.

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Crédits photo : CodeBrahma

Jérôme de Tychey développe cette idée : « Prenons l’exemple d’une œuvre d’art : en tant qu’artiste, j’utilise une paire de clés cryptographiques pour signer une transaction blockchain qui génère le NFT. Cette étape est similaire à la technologie utilisée dans la plupart des signatures numériques de documents, que vous avez peut-être reçues vous-même par e-mail. Dans le même temps, j’ai attribué un fichier qui représente mon art. Je peux maintenant transférer et vendre ce fichier NFT à n’importe qui, et n’importe qui peut prouver que ce fichier NFT vient de moi car il porte ma signature numérique. Après avoir « libéré » le NFT, quelqu’un peut copier le fichier et créer un autre NFT avec le même fichier en utilisant sa propre signature, aucune barrière n’existe ici. Cependant, si un tiers gère un musée basé sur la blockchain, ce tiers ne peut que mettre sur liste blanche et publier les NFT des artistes vérifiés, tandis que le conservateur d’art peut suivre en temps réel chaque NFT qu’un artiste a créé. »

Perspectives et défis futurs

Ioan Florea explique qu’il n’est actuellement pas encore possible de stocker des fichiers d’impression 3D (STL / OBJ) directement sur la blockchain – il faudrait pour cela générer un lien (qui n’est donc pas sécurisé par la blockchain, ce qui représente un désavantage important pour les acheteurs). Il espère que cela changera à l’avenir et que les plateformes rendront également le crypto-mining plus efficace ou durable. Il note également que certaines plateformes privilégient les animations et les vidéos JPEG, des supports numériques finalement traditionnels. L’impression 3D, dit-il, est une forme d’art relativement nouvelle, mais qui deviendra plus courante. Danit Peleg espère également que les NFT pourront contribuer à démocratiser complètement la mode. Elle imagine qu’à l’avenir, ses vêtements seront portés non seulement dans le monde réel, mais aussi dans un métavers (un espace virtuel collectif). La styliste est également convaincue que la forte consommation d’énergie des NFT, et donc son impact néfaste sur l’environnement, s’améliorera considérablement avec le temps. La raison pour laquelle la blockchain est si gourmande en énergie sera expliquée dans la vidéo suivante.

Vous pouvez maintenant vous demander pourquoi ces jetons non fongibles sont proposés et ensuite achetés. Les biens numériques peuvent-ils avoir une quelconque valeur ? Et comment justifier leur impact négatif sur l’environnement ? Il est vrai qu’à l’heure actuelle, les avis sont encore partagés sur cette question. Alors que certains voient clairement la valeur ajoutée et le potentiel des NFT, d’autres sont encore dubitatifs. Il reste donc à voir si et dans quelle mesure les NFT détermineront la manière dont nous évaluerons les biens numériques à l’avenir. Quoi qu’il en soit, nous continuerons à suivre la tendance et sommes déjà impatients de voir quelles autres opportunités se présenteront dans ce domaine pour l’impression 3D.

Que pensez-vous des NFT et de leur utilisation en impression 3D ? N’hésitez pas à partager votre avis dans les commentaires de l’article ou avec les membres du forum 3Dnatives. Retrouvez toutes nos vidéos sur notre chaîne YouTube ou suivez-nous sur Facebook ou Twitter !

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