La Pâtisserie Numérique développe un slicer pour l’impression 3D alimentaire
L’impression 3D alimentaire présente un certain nombre de défis même si elle permet de créer des formes et géométries plus complexes, ajoutant de l’originalité à vos plats. Marine Coré Baillais s’est justement donnée comme objectif de lever ces défis en lançant La Pâtisserie Numérique. Après avoir passé plus de 7 ans chez Sculpteo, un service d’impression 3D français, Marine décide de se lancer dans l’impression 3D alimentaire, passionnée depuis toujours par les pâtisseries. Son premier projet consiste à développer un logiciel de tranchage – slicer – adapté à la matière extrudée. Nous l’avons rencontrée afin d’en savoir plus sur ce projet en particulier : elle a même réalisé une petite vidéo pour nous montrer comment utiliser le slicer pour faire un gâteau imprimé en 3D.
3DN : Pourquoi avez-vous décidé de créer le projet de la Pâtisserie Numérique ?
A mon départ de Sculpteo, j’avais plusieurs objectifs : je voulais continuer à fabriquer et je voulais développer le travail de la main, car j’accorde beaucoup de valeur au savoir-faire des artisans, à la précision et la qualité de leur geste. Je travaillais depuis 7 ans sur une techno formidable avec beaucoup de clients dans des industries variées mais peu avec l’agro-alimentaire. Cela me frustrait beaucoup : des imprimantes 3D alimentaires existent mais ce n’était pas devenu un usage courant.
Réaliser des pâtisseries est une de mes passions alors j’ai choisi de retourner à l’école et passer mon CAP pour devenir artisan pâtissier. A 45 ans c’était une sacrée expérience ! Je suis devenue commis dans les restaurants, notamment au Meurice, pour apprendre les exigences de ce métier et leur manière de produire (très différente de celle que nous avions établie chez Sculpteo). Cela m’a permis de comprendre certains obstacles à l’adoption de la fabrication additive dans ce secteur phare de la tradition française !
Depuis mon diplôme j’ai monté une nouvelle société La Pâtisserie Numérique, pour apporter de la valeur à notre technique de production préférée dans le secteur de la pâtisserie. Un de nos premiers projets consiste à monter un slicer dédié à l’impression 3D de nourriture.
3DN : Quelles sont les spécificités de ce slicer justement ?
Une des difficultés d’imprimer des aliments c’est qu’ils ne réagissent pas comme du plastique, ce n’est pas un mono-matériau mais une combinaison de plusieurs ingrédients, qui réagissent entre eux selon la température et dans le temps. Et quand on extrude un matériau visqueux d’une seringue (la façon la plus simple de démarrer l’impression 3D d’aliments quand on a une FDM chez soi), on comprend vite que les rétractations ne sont pas tes meilleurs amis…
Comme tout le monde, je me suis mise à tester plein de sets de paramètres dans Cura, dans Slic3r et si les modes “vase” ou “spirale” répondent à une partie des problèmes, cela demande de l’expertise. Aujourd’hui il est impossible de prendre n’importe quel bon fichier 3D et de l’imprimer directement dans un matériau comestible. Dès lors, cela devient difficile d’expliquer à un pâtissier qu’il va pouvoir tout faire avec cette machine !
J’ai eu l’opportunité de discuter de ces problèmes avec Pierre-Antoine Adragna de l’Université Technologique de Troyes et nous avons démarré le projet de construire un slicer spécifique dont la principale caractéristique est de calculer une trajectoire continue pour chaque couche. En supprimant les rétractations et les mouvements de non-impression on gagne en précision et en temps de fabrication.
On a choisi de faire la démo sur une forme impossible à réaliser à la main, même pour un pâtissier très habile : la rosace de Notre-Dame, qui a déjà été utilisée par Nina Metayer pour fabriquer un moule en silicone. Nous voulions relever le défi de l’impression 3D directe, avec des murs de 0.8 mm d’épaisseur.
3DN : Que faut-il prendre en compte et à quoi faut-il faire attention ?
Il y a plusieurs aspects à gérer dans un slicer pour l’alimentaire : le matériau extrudé, on en a parlé un peu plus haut, et la manière dont il est extrudé. Souvent on utilise une cartouche remplie du matériau. Pour faire sortir le matériau d’une seringue ou d’un cylindre relié à une pompe, on rajoute de la pression. Cependant, nous ne contrôlons habituellement que le déplacement de cette seringue dans le slicer. Ce lien entre déplacement et pression est très dur à obtenir. En effet il faut prendre en compte la viscosité du matériau et sa compressibilité ; or, le matériau utilisé n’est pas comme du filament, toujours identique, mais varie un peu à chaque préparation. De plus, ces paramètres varient également en fonction de la proportion de matériau présent dans la cartouche, on doit donc venir adapter la valeur du flow d’extrusion au fur et à mesure de la consommation. De plus, on doit gérer que cette cartouche a une quantité finie, réduite en comparaison d’une bobine de filament…
Encore une fois, plein de petites choses qui peuvent se résoudre en tordant l’usage des slicers développés pour les plastiques mais qui viennent décourager tout néophyte. Il y a à la fois une partie du travail très mathématique pour la génération des trajectoires et un travail d’interface pour améliorer l’usage. Notre objectif est de proposer l’outil en ligne, probablement en Saas. Nous cherchons des beta-testeurs et nous discutons avec les fabricants d’imprimantes 3D alimentaires pour travailler en partenariat. N’hésitez pas à vous rendre sur notre site internet ICI pour en savoir plus !
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