GREENFILL3D transforme les déchets de production en matériaux d’impression 3D
Il y a quelques semaines, nous vous avons parlé pour la première fois de GREENFILL3D, une startup polonaise à l’origine de matériaux écologiques et biodégradables pour l’impression 3D. Elle a notamment développé un filament à base de son de blé, GF3D Branfill3D. Ce matériau a été créé conformément aux concepts modernes de zéro déchet et d’économie circulaire : le son de blé est un déchet de production issu de la fabrication de pâtes. À partir de ce filament, la startup a imprimé en 3D ses propres points de vente (le fameux POS – Point of Sales), sur lesquels seront présentées et vendues des paquets de pâtes. Ce projet est développé en collaboration avec le groupe MASPEX, l’un des plus grands producteurs alimentaires d’Europe. Pour en savoir plus sur l’activité menée au sein de l’entreprise et de ses filaments, nous avons rencontré son directeur, Pawel Slusarczyk.
3DN : Pouvez-vous vous présenter ainsi que votre lien avec l’impression 3D ?
Je m’appelle Pawel Slusarczyk et je travaille dans le secteur de l’impression 3D depuis plus de 9 ans. En janvier 2013, j’ai fondé Centrum Druku 3D, le plus grand site d’impression 3D en Pologne, qui a contribué à développer l’industrie polonaise de la fabrication additive. Toutes les grandes entreprises polonaises, telles que Zortrax, Sinterit, Zmorph, Omni3D, 3DGence, Technology Applied, Spectrum Filaments, Fiberlogy et bien d’autres, ont fait leurs débuts sur notre site. J’ai de nombreuses années d’expérience dans la mise en œuvre de projets innovants – en 2019, nous avons créé nos propres bio-imprimantes 3D – appelées SKAFFOSYS, et par la suite, nous avons lancé un laboratoire de bio-impression 3D en Pologne. En 2020, ce projet a été détaché de notre entreprise et poursuivi par une autre équipe indépendante.
3DN : Comment est née l’idée de créer GREENFILL3D ? Quelle est sa mission ?
En 2021, nous avons établi une coopération avec le groupe MASPEX, le plus grand producteur alimentaire de Pologne et l’un des plus grands d’Europe. Le groupe MASPEX nous a contactés avec l’idée de créer des supports publicitaires à partir de ses déchets. L’entreprise disposait de différents déchets post-production, tant organiques (déchets végétaux, son de blé, etc…) que de cartons et de plastiques. Finalement, nous avons opté pour le son de blé, à partir duquel nous avons décidé de produire un filament pour la technologie FDM / FFF. En juillet 2021, nous avons signé un accord de coopération officiel et avons commencé le processus de recherche et de développement.
Pour faciliter les formalités, nous avons décidé de séparer immédiatement ce projet de CD3D et, en juillet 2021, nous avons créé une nouvelle société indépendante : GREENFILL3D. Nous avons également participé à un projet de l’UE – ScaleUp, qui nous a fourni un financement adéquat pour la recherche et le développement.
Nous avons invité à coopérer avec la PAN (Académie polonaise des sciences), la plus grande et la plus prestigieuse institution scientifique de Pologne, avec laquelle nous avons déjà collaboré sur le projet de bio-imprimante 3D. Ensemble, nous avons développé un mélange chimique unique composé de son de blé, de PLA et d’autres composés chimiques, tous entièrement biodégradables !
En conclusion, notre mission consiste à rechercher des matériaux respectueux de l’environnement, en mettant l’accent sur les bioplastiques qui sont réellement biodégradables et compostables. En même temps, nous recherchons des applications où l’utilisation de ces matériaux est fonctionnelle et a du sens – nous sommes conscients qu’à l’heure actuelle, les bioplastiques ne peuvent pas remplacer, par exemple, les polyamides ou le polycarbonate. Nous recherchons des objets qui peuvent être imprimés, par exemple à partir de son de blé, mais qui restent fonctionnels. Nous ne voulons pas imposer les bioplastiques là où ils ne sont pas adaptés.
3DN : Quels sont les principaux avantages de la transformation des déchets de blé en filaments pour l’impression 3D ? Ses limites ?
Le son de blé possède des propriétés fantastiques et étonnantes. Au début du projet, nous avions très peur que le filament soit fragile et se casse, mais comme le son est fibreux, les impressions 3D finies sont flexibles, pas comme le polypropylène ou le TPU, mais elles ne sont pas faciles à casser. En testant nos stands, nous avons chargé une étagère de quelques kilos – au cours de la semaine, l’étagère et les parois latérales ont beaucoup plié, mais ne se sont pas brisées. De plus, lorsque nous avons fait pivoter l’étagère de 180 degrés et que nous y avons appliqué le même poids, elle s’est redressée en 2 ou 3 jours, puis s’est pliée de l’autre côté. Mais il n’y a aucune trace de fissure.
Outre les propriétés physiques du son de blé sous forme de filament, l’idée d’utiliser des déchets de production et de les transformer en matériau d’impression 3D, à partir duquel nous créons des supports faisant la promotion des pâtes dont il est issu, est fascinante.
Quant aux limites, elles sont peu nombreuses et je pense qu’elles sont faciles à résoudre. Pour le moment, il faut utiliser une imprimante 3D avec une buse de plus grand diamètre : 0,5 – 0,6 – 0,8 mm ; bien sûr, nous sommes capables d’imprimer le filament avec un diamètre de 0,4 mm, mais avec des diamètres plus élevés, nous sommes sûrs que le matériau sortira correctement. Pour l’instant, nous ne disposons que d’un filament de 1,75 mm de diamètre, ce qui n’est pas très adapté à l’extrudeur Bowden, et nous ne recommandons donc que l’extrudeur direct. Toutefois, nous prévoyons un filament de 2,85 mm de diamètre et le testerons, par exemple, sur une Ultimaker ou une BCN3D ; je suis convaincu qu’alors le problème de l’extrudeur Bowden sera résolu.
3DN : Envisagez-vous de développer d’autres filaments à partir de déchets alimentaires à l’avenir ?
Oui, bien sûr. Chez GREENFILL3D, nous disposons d’une feuille de route détaillée pour les actions de R&D à venir. Tout d’abord, nous voulons porter le pourcentage d’utilisation du son de blé à 40 % à l’échelle de la production, puis développer quelque chose de nouveau. Nous allons probablement continuer à utiliser le son de blé, mais les autres composants seront différents. Il y a beaucoup de bioplastiques intéressants à essayer.
3DN : Où voyez-vous l’avenir du zéro déchet dans l’impression 3D ?
Partout. Au cours des derniers mois, j’ai exploré en profondeur le sujet de la production de plastiques à partir de matériaux respectueux de l’environnement et je peux vous assurer qu’il n’y a pas une seule grande entreprise chimique au monde qui ne fasse pas de recherches dans ce domaine. Nous sommes à l’aube d’une révolution majeure dans le domaine des matières plastiques, dont beaucoup sont fondées sur le concept de zéro déchet. Les effets seront visibles dans quelques années mais c’est certain et inévitable.
Pour l’instant, l’impression 3D industrielle est loin d’être verte. Tout le monde s’efforce de remplacer les métaux par des plastiques performants mais ils ne sont pas éternels. Le recyclage de ces plastiques semble meilleur en théorie qu’en pratique : dans le monde, seuls 10 % des déchets plastiques sont recyclés, le reste allant à la décharge ou flottant dans les mers et les océans.
En attendant que ce problème soit résolu à grande échelle – et nous parlons ici d’usines géantes de production de déchets – GREENFILL3D est convaincu que la meilleure solution est celle des bioplastiques, qui sont conçus pour se décomposer naturellement dès le départ. Bien entendu, tout ceci ne s’applique pas seulement à l’impression 3D, qui reste une niche, mais à toutes les matières plastiques dans le monde.
3DN : Un dernier mot pour nos lecteurs ?
Soyez responsable lorsque vous imprimez en 3D à la maison ou sur votre lieu de travail. Si vous n’y êtes pas absolument obligé, essayez d’utiliser des matériaux respectueux de l’environnement. Pensez également à l’utilisation courante des plastiques dans la vie quotidienne. Les gens s’inquiètent de mourir du COVID-19, alors que la véritable menace est le plastique qui nous inonde partout. C’est l’une des nombreuses menaces réelles dont presque personne n’est conscient. Lisez, réfléchissez et envisagez de faire quelques changements. N’attendez pas que les autres le fassent.
Que pensez-vous des développements menés par GREENFILL3D ? N’hésitez pas à nous dire ce que vous pensez dans les commentaires de l’article. Retrouvez toutes nos vidéos sur notre chaîne YouTube ou suivez-nous sur Facebook ou Twitter !
*Crédits photo de couverture : GREENFILL3D