Aérospatiale et Défense

L’impression 3D avec du régolithe pour construire sur la Lune

Les projets visant à établir une présence humaine durable sur la Lune avancent progressivement. Parmi eux, le programme Artemis de la NASA figure parmi les plus ambitieux. Mais un tel objectif s’accompagne de nombreux défis, dont celui du transport de matériaux de construction depuis la Terre. Pour y répondre, plusieurs pistes ont été proposées depuis le lancement du programme. La plus récente provient d’une étude menée à l’université Concordia, au Canada, qui suggère d’utiliser le régolithe lunaire comme matière première pour bâtir directement sur place.

Publiée récemment sur la plateforme scientifique arXiv, cette recherche explore la possibilité de créer un matériau d’impression 3D à base de PEEK (polyétheréthercétone), renforcé par un analogue du régolithe lunaire. Ce composite permettrait de fabriquer sur la Lune des pièces, des outils, voire des infrastructures, en exploitant les ressources locales.

Exemple de filament présentant quelques irrégularités dans son épaisseur. (Crédits : arXiv)

L’impression 3D est déjà un processus complexe sur Terre, alors imaginez les défis que représente son utilisation sur la Lune ! Il faut composer avec des conditions extrêmes : variations de température, rayonnement, faible gravité, entre autres. Les premières tentatives de combinaison entre le régolithe et le PEEK s’étaient terminées par des échecs, principalement à cause de problèmes d’extrusion. De plus, les pièces obtenues présentaient une forte porosité, ce qui diminuait leur résistance mécanique et les rendait plus fragiles.

Pour surmonter ces obstacles, l’équipe dirigée par Mohammad Azami a introduit deux innovations majeures. La première est une extrudeuse à double vis, capable de mélanger le PEEK avec jusqu’à 50 % de régolithe analogue de manière plus homogène. La seconde consiste en l’ajout d’un « radeau » spécial en PEKK (polyéther-cétone-cétone) : une fine couche intermédiaire déposée via une seconde buse, qui améliore l’adhérence sur la plaque de fabrication et réduit les déformations des pièces imprimées.

Après avoir optimisé le processus, les chercheurs ont soumis les pièces à un traitement de recuit à 300 °C. Cette étape a permis d’améliorer certaines propriétés mécaniques, mais ses effets étaient limités pour les mélanges contenant plus de 40 % de régolithe. Les résultats ont montré que l’ajout du matériau lunaire augmentait la rigidité des pièces jusqu’à 41 % et réduisait les déformations pendant l’impression, améliorant ainsi la précision dimensionnelle. Cependant, la résistance à la traction diminuait : elle passait de 107 MPa pour le PEEK pur à 90 MPa pour les pièces contenant 40 % de régolite, et à environ 70 MPa pour celles avec 50 %. La fragilité augmentait également, avec une capacité d’allongement avant rupture plus faible.

Exemples représentatifs de répliques imprimées, allant du PEEK pur au PEEK contenant 50 % en poids de régolithe.

La recherche conclut que le mélange le plus équilibré se situe autour de 60 % de PEEK et 40 % de régolithe. Cette composition permet de réduire la quantité de matériaux transportés depuis la Terre tout en conservant des propriétés mécaniques satisfaisantes. Ces résultats fournissent ainsi une référence pratique pour les futurs projets de fabrication additive dans l’espace.

Les chercheurs précisent qu’il ne s’agit que d’une première étape. Leur prochain objectif sera de tester ces techniques dans des environnements simulant les conditions lunaires, incluant le vide, la faible gravité, les cycles thermiques extrêmes et le rayonnement. Ils envisagent également d’expérimenter avec d’autres polymères et de développer des systèmes d’impression robotisés grand format, capables de construire directement sur la Lune des structures complètes, comme des habitats. Pour en savoir plus, la publication scientifique est disponible ICI.

Que pensez-vous de ce matériau qui combine régolithe lunaire et PEEK ? Partagez votre avis dans les commentaires de l’article. Vous êtes intéressés par l’actualité de l’impression 3D dans l’industrie aérospatiale ? Cliquez ICI. Vous pouvez aussi nous suivre sur Facebook ou LinkedIn !

*Photo de couverture : représentations du matériau avec différents pourcentages de régolithe. Crédits, arXiv

Carla C.

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Carla C.

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